La Cour d’Appel d’Aix en Provence a été saisie du recours d’un restaurateur contre un jugement qui l’avait déclaré civilement responsable d’une chute d’un enfant de deux ans, installé sur une chaise haute fournie par son établissement.
Les parents de l’enfant ont demandé une chaise haute pour leur enfant, qui leur a été fournie par le restaurateur. Durant le repas, l’enfant s’est agité et a chuté de sa chaise, alors qu’il était indéniablement sous la surveillance de ses parents.
Il a cependant été relevé que la chaise haute fournie par le restaurateur n’était plus équipée de la ceinture devant maintenir l’enfant attaché sur la chaise.
Le restaurateur, dont la responsabilité a été recherchée dans cet accident, a fait valoir que l’enfant était sous la surveillance de ses parents, qui devaient donc veiller en premier à sa sécurité.
Or, selon ce commerçant, c’est bien le comportement anormal de l’enfant qui est en cause, puisqu’il s’est agité sur sa chaise, sans que ses parents n’interviennent pour autant. L’accident corporel de l’enfant serait donc selon lui causé par un défaut de surveillance des parents, ceci l’exonérant de toute responsabilité.
Nous sommes donc en présence d’un accident de la vie, relevant du droit commun de la responsabilité civile.
Cette affaire est donc l’occasion de poser les conditions de la responsabilité du commerçant au regard de la sécurité qu’il doit à sa clientèle.
D’après la Cour d’appel, le simple fait pour un client de se trouver à l’intérieur d’un local commercial, fait naître d’ores et déjà une relation contractuelle, même en l’absence d’achat, dans le cadre de laquelle le commerçant est tenu à une obligation de sécurité à son égard.
Cette obligation n’est cependant pas absolue, dans la mesure où la simple survenance d’un accident n’induit pas automatiquement la responsabilité du commerçant. Le commerçant doit tout mettre en œuvre pour assurer la sécurité des clients dans son établissement. Pour autant, il n’a pas l’obligation de la garantir, en toutes circonstances !
L’obligation du commerçant est en effet une obligation dite « de moyen » et non une obligation « de résultat », de sorte que sa responsabilité ne peut découler que d’une faute, qui doit être démontrée par la victime.
Cette faute était établie dans le cas d’espèce, puisqu’il a été reconnu que la chaise haute n’était plus équipée de l’attache, et qu’elle était donc défectueuse.
La solution sur ce point est classique.
La décision de la Cour d’Appel d’Aix en Provence est cependant intéressante en ce qu’elle refuse de prendre en compte le comportement agité de l’enfant, qu’elle estime normal au regard de son âge. Il ne peut donc être fautif à l’égard de l’enfant.
En ce qui concerne l’obligation de surveillance des parents, la Cour estime qu’elle n’est pas démontrée, et qu’elle n’est pas de nature à annuler ou alléger la responsabilité du commerçant, qui doit répondre en tout état de cause de sa faute, sans allègement de sa responsabilité civile.
Maître Laurent DENIS-PERALDI, avocat praticien de l’indemnisation des victimes d’accident corporels, a été confronté à un cas similaire, où une cliente d’une grande surface avait glissé sur de l’huile répandue sur le sol.
On retrouve le même raisonnement : Obligation de sécurité du commerçant, découlant d’une faute, puisque le sol n’a pas été nettoyé, et ce, indépendamment du comportement de la victime.
C’est pourquoi, si vous êtes victime d’un accident corporel dans un espace public commercial, il vous faudra, pour être indemnisé, rapporter la preuve qu’il a été causé par un dysfonctionnement, un défaut d’entretien, une mauvaise configuration des lieux…
Cette preuve pourra être rapportée par tous moyens : témoignages, photos, constat d’huissier, rapport des services de secours…