L’incidence Professionnelle souvent négligée lors des expertises médicales.

août 30, 2020

Votre avocat chargé de défendre l’indemnisation d’un préjudice corporel s’attache immédiatement à en analyser les répercussions, tant dans la sphère privée et familiale, que dans la sphère professionnelle.

Pour autant, l’analyse de ce préjudice semble hélas souffrir d’une approche de plus en plus négligente de ses aspects techniques, et de l’enjeu majeur qu’il représente lorsqu’il s’agit de rétablir la victime d’un accident corporel dans ses droits.

Lorsqu’il s’agit de comptabiliser la perte de revenus imputable à l’accident corporel, le montant du préjudice va dépendre d’un calcul assez objectif, et assez simple, pour peu que la victime avait avant son accident un emploi stable, avec une rémunération établie et régulière sur plusieurs mois qu’il vienne impacter son activité professionnelle.

Mais cette perte de revenu que l’on désigne comme la « Perte de Gains Professionnels Futurs » (après consolidation), n’a rien à voir avec « l’incidence Professionnelle » imputable à l’accident corporel.

Votre avocat à NICE, praticien de l’indemnisation du Préjudice Corporel vous alerte sur l’enjeu d’un tel préjudice, qui, selon chaque cas, mérite une présentation particulière qu’il va falloir défendre, surtout lors de l’expertise médicale.

Maître Laurent DENIS-PERALDI, fort de son expérience de la pratique de l’indemnisation, vous suggère modestement quelques règles de base:

1 – Bien définir et comprendre ce que représente l’Incidence Professionnelle découlant d’un accident corporel:

La pratique de l’indemnisation du préjudice corporel, est certainement l’un des domaines du droit qui est le plus technique et surtout, en constante évolution.

L’évolution, en dépit de la pression constante des assureurs, tend toujours à améliorer l’indemnisation des victimes de dommages corporels.

Encore faut-il que cette évolution soit prise en compte appliquée, notamment au stade crucial de l’expertise médicale. C’est hélas rarement le cas.

Il est bon de rappeler qu’au cours des années 2005 et 2006 (cela remonte tout de même à 15 ans), l’approche du préjudice corporel de la victime d’un accident a été profondément repensée, pour une meilleure individualisation des préjudices subis, qui doit prendre en compte la situation de chaque victime et aborder son handicap sous un angle fonctionnel.

Cette nouvelle approche demande indéniablement plus de temps d’analyse que l’approche « anatomique » des lésions, qui conserve l’indéniable préférence des médecins expert, en ce qu’il leur suffit, pour la décrire, d’appliquer en vis à vis de chaque lésion, un taux proposé par leur barème de référence (souvent établi par les assureurs – Voir sur ce point l’actualité de Maître Laurent DENIS-PERALDI, avocat à NICE, sur la question des barèmes médico-légaux).

Avant la refonte de la méthode d’évaluation médicolégale, les répercussions professionnelles de l’accident de la victime étaient analysées dans le cadre du taux d’invalidité, que l’expert majorait (ou pas) lorsqu’il avait un impact sur l’activité professionnelle exercée par la victime.

Cela fait bien longtemps que cette méthode est proscrite, puisqu’il s’agit désormais d’isoler la question des répercussions professionnelles et d’analyser pour chaque victime, indépendamment de toute perte de revenus:

si elle doit ou non devoir changer de profession,
Si elle va pouvoir continuer son emploi dans les mêmes conditions,
Si son état n’a pas pour effet de la dévaloriser sur le marché du travail,
Mais aussi la perte d’un projet de vie professionnelle,
l’impossibilité de s’orienter vers certains métiers, qui étaient pourtant le sujet de projets avérés.
…….

Il faut donc bien comprendre que la question est vaste, surtout en présence d’une victime qui n’a pas encore de vie active (écolier, étudiant), ou dont le profil de carrière est encore incertain ou tend à la réalisation de plusieurs projets non encore réalisés.

La question de l’incidence professionnelle ne se réduit donc pas à la seule question de la reprise ou non de l’activité exercée avant l’accident.

C’est pourtant très souvent une approche restrictive que les experts imposent en n’évoquant que l’activité professionnelle exercée au moment de l’accident, sans s’interroger également sur les restrictions provoquées par l’accident dans le cadre plus général du marché du travail.

Prenons l’exemple d’un homme de 35 ans, qui a obtenu un diplôme pour les métiers de la restauration. Après avoir travaillé en saisonnier, et à la recherche d’un projet professionnel, il exerce plusieurs métiers, guide touristique, agent immobilier, avant de passer avec succès le concours de la Police Nationale. Il est engagé et l’accident survient quelques années plus tard.  Lésé au niveau des membres inférieurs, il est réformé pour raison médical.

L’immense majorité des experts va avoir tendance à décrire d’une ligne l’incidence professionnelle en retenant « la victime, du fait de son accident, ne pourra plus exercer sa profession ».

Il est certes important d’apporter cette réponse. Mais cette seule réponse est très insuffisante: L’analyse de l’incidence professionnelle est clairement bâclée, et l’indemnisation de la victime va en subir de lourdes conséquences.

En effet, d’autres questions doivent être posées:

Pour reprendre notre exemple: Nous sommes en présence d’une victime dont la seule formation est en lien avec les métiers de la restauration. Du fait de ses lésions, elle ne pourra plus envisager d’exercer ce type de métier. Elle a donc perdu le bénéficie de sa formation initiale et de ses expériences professionnelles. Elle subit donc une dévalorisation à ce titre sur le marché du travail.

Pour la compenser, elle doit donc envisager une reconversion.

Il faut également faire valoir que notre Policier s’était engagé pour x années et que son parcours professionnel passé démontre qu’elle n’envisageait pas de s’investir sa vie durant dans un seul métier. Il faut donc déterminer le type de métier qu’elle ne pourrait plus choisir désormais, en raison de son handicap.

Pour atteindre le niveau de diplôme qu’elle avait durant l’accident, elle devra entreprendre une formation, qui peut durer plusieurs années, sans rémunération…..

2  – Exiger lors de l’expertise que l’Incidence Professionnelle soit étudiée au regard des restrictions fonctionnelles découlant de l’accident.

Il faut absolument exiger de l’expert qu’il décrivent quels sont les activités, les gestes, qui sont difficiles ou impossible, et d’indiquer alors quels sont les types de métiers qui ne pourront plus être exercés.

L’indemnisation du préjudice corporel doit aussi évoluer avec notre société.

Le temps des carrières réalisés dans une seule entreprise, sur un seul métier, et révolu.

A l’heure où l’on vante les qualités d’adaptabilité, de mobilité, de flexibilité, n’est il pas scandaleux de limiter la réflexion à la seule activité professionnelle exercer au jour de l’accident, au lieu d’analyser la perte de potentiel et de mise à profit des compétence acquises ou en voie d’acquisition?

3 – La gestion du temps de l’indemnisation du préjudice corporel:

Votre avocat chargé de l’indemnisation de votre préjudice corporel a pour mission de vous voir offrir la meilleure indemnisation possible.

Pour y parvenir, des choix devront être faits.

Il est tout à fait compréhensible pour une victime de vouloir obtenir le plus rapidement possible son indemnisation, ne serait-ce que pour tourner la page de l’accident douloureux.

Nous savons que son indemnisation sera possible lorsque, sur le plan médical, son état sera stabilisé, et ne sera donc plus susceptible d’évoluer sensiblement. C’est la notion de consolidation médico légale.

Mais la consolidation « physiologique » n’implique pas pour autant une stabilisation identifiable de la situation socio-professionnelle de la victime.

Cette dernière peut encore en être au stade d’une recherche de projet. N’avoir pas eu l’énergie et le ressort nécessaire de se projeter de nouveau dans une activité professionnelle.

Il est donc parfois opportun de se poser, de s’interroger, et de proposer une indemnisation partielle, et d’attendre un peu que la situation socio-professionnelle nouvelle se concrétise pour en appréhender les justes conséquences.

Régler l’indemnisation d’un préjudice futur peut elle se concevoir sans risque lorsque l’avenir est encore obscur?